Légendes de l'Aède

Quatre héros grecs


Quel était l’enseignement des premières écoles des mystères Grecques ?
Car il existait déjà des écoles des mystères avant l’école d’Orphée et celles d’Eleusis et de Dionysos. Et pourquoi pas... peut-être même avant l’époque dite Mycénienne.


Statue grec ancienne en pierre,  de femme avec un oiseau sur l'épaule

Grâce au déchiffrage du linéaire B, nous savons que certains dieux grecs existaient déjà. Il semble également que l’influence du matriarcat des époques néolithiques soit encore présente puisque les déesses féminines étaient importante, comme l’a démontré Mme Cécile Boëlle dans son ouvrage « PO-TI-NI-JA, l’élément féminin dans la religion mycénienne. ».
Il semble aussi que le culte des dieux était déjà présent à l’arrivée des mycéniens, qui s’établirent sur les restes de la civilisation Crétoise.
Cette riche civilisation, dite Minoenne depuis sir Arthur Evans, était en étroite relation avec l’Egypte, et elle a pu bénéficier de la culture profonde du peuple nilotique. Mais, à moins de retrouver des textes Egyptiens sur ces échanges religieux, nous ne pouvons que conjecturer sur les courants de pensées que ces peuples ont échangés.


Ce qui est sûr, c’est que, pour qu’Homère et Hésiode aient pu retracer les mythes aussi précisément dès le début du renouveau Grec - après les âges noirs - qui ont décimé plus des trois quarts des anciens grecs, dit mycéniens – il fallait que ces mythes soient très important.


Les historiens expliquent la longévité de ces mythes et légendes, par la dimension sociale permettant la forte cohésion d’un groupe linguistique comme le peuple Grec.
Est-ce la seule raison ?
La sagesse inscrite au fronton des temples : « Homme connais-toi toi-même », et les nombreux philosophes que ce peuple a donné au monde, indique clairement l’orientation de pensée qui a accompagné les penseurs lors des différentes colonisation grecques.
Il existait ainsi depuis la plus haute antiquité des groupes d’homme et de femmes qui essayaient de comprendre l’univers, et c’est au centre de cet espace extraordinaire qu’ils découvraient leur propre existence. L’influence de la proche civilisation égyptienne riche de millénaire de spiritualités, ne peut être niée, même si l’on n’a que peu d’éléments aujourd’hui encore sur leurs relations.
Quel était donc l’enseignement ésotérique diffusé par les premières écoles des mystères ?


Épisode mythologique sur un vase antique

Même si l’influence égyptienne était présente, le message Grec était différent. Les textes mythologiques Egyptiens sont imprégnés d’une philosophie posée sur le sens d’une harmonie de l’univers, particulière à la géographie de ce pays : en équilibre sur un fleuve, à la croisée de la course du soleil, (voir mes pages et mon diaporama sur l’Egypte).
Les écoles des mystère grecque était plus orientées à soutenir la volonté de découverte des hommes et des femmes de ce pays. Au bout d’un certains temps, cette soif de découverte se tournait inévitablement, face aux secrets de la mer et du monde, vers l’être intérieur. Support des écoles initiatiques, ces histoires de bravoure et de quêtes permirent aux hommes, de s’identifier d’abord à ses héros, puis d’intégrer le message profond qui permettait de guider l’initié dans son monde intérieur.
Ainsi la mythologie est née, décrivant d’abord la naissance de l’univers, la chute dans un monde de phénomènes, de recherche insatiable et de désirs, (Narcisse - Tantale) et ensuite le chemin de connaissance de soi permettant l’union avec le divin intérieur.


Vase Grec

Pour répondre à l’interrogation cruciale du « Connais-toi toi-même », quatre formes initiatiques sont inventées, quatre quêtes romancées représentées par quatre héros dans la mythologie Grecque: Héraklès, Thésée, Persée et Jason.
Leurs aventures glorieuses ainsi que leur personnalités sont différentes... et bien sûr chaque histoire a une signification particulière….
Ces quatre héros vivent des aventures extraordinaires, tellement riches en prouesses valeureuses susceptibles d’émouvoir au plus haut point les anciens grecs, qu’au fil du temps, les Grecs eux-mêmes se mirent à prendre ces personnages pour des modèles ayant existé et à les considérer comme leurs ancêtres.
Quelle est la réalité qui sous-tend ces personnages ?
Quelle est leur véritable signification ?
Ces mythes ont-ils servi uniquement de stéréotype vertueux et moraux ?

Il est certains que le sens de ces histoires est bien plus profond, que de simple récits "moraux" ou éducatifs, mais avec le temps ces récits ont perdu une partie de leur sens symboliques. Nous pensons que ces histoires ont servi lors des cérémonies d’initiations, car les quêtes qu’elles représentent sont particulièrement adaptées pour aider la psyché humaine lors d’un chemin de connaissance de soi. Chacune de ces épopées décrit un comportement différent pour illustrer un processus de conscience à un moment particulier, à un stade clé du chemin spirituel.


Examinons chaque héros :
-Persée, fils de Zeus est le prototype de l’action, de celui qui se dépasse, qui immobilise tous ses ennemis par sa propre volonté.
-Thésée, est fils de Poséidon, il est serviteur de la puissance divine enfouie en lui-même.
-Jason symbolise l’orientation vers le divin. il est l’anti-héros car jamais il n’accomplit de hauts faits par ses seules forces, mais seulement grâce à la puissance de ses compagnons et à la magie de Médée.
-Héraklès est la puissance personnifiée tant par ses muscles que par son orgueil, car il sait qu’il est le fils de Zeus, mais il ne pourra rejoindre son père que lorsque il aura vaincu sa propre nature.
Ces quatre héros signifient quatre stades ou quatre états sur le chemin de la connaissance de soi. Malheureusement nous ne disposons plus de texte intégral pour les épopées de Persée, Thésée et Héraklès. Les textes complets comme les héraklèides du septième siècle ont disparu et n’existent plus qu’a l’état de bribes plus ou moins développées. Nous trouvons une synthèse des ces bribes de différents auteurs dans le texte d’Apollodore du IIe siècle avant notre ère. Seule l’épopée de Jason a été retranscrite de façon complète et « savante » par Apollonios de Rhodes, ce qui a permis l’étude de ce texte dans une autre page de ce site.


Céramique grecque ancienne

Le premier à être enseigné au sein d’une école des mystères, devait être...
le mythe de Persée
- Celui-ci était le fils de Zeus et de Danaé.
- Le père de Danaé, furieux de cette naissance que l’on avait prédit comme funeste pour lui, mit la mère et le fils dans un coffre qu’il jeta à la mer. De là naquirent les aventures de Persée :
- il rapporta la tête de la gorgone : Méduse, au roi de Sériphos, - il vainquit le monstre marin, et - il délivra Andromède. - Ensuite, il retrouva son héritage par la mort accidentelle de son grand-père.
Ce mythe devait poser plusieurs points essentiels pour ancrer dans la conscience du myste, la trame d’un processus initiatique.
1/ Une naissance divine signifiant l’élément spirituel réveillé dans le cœur
2/ la personnalité égocentrique ne pouvant accepter cette réalité.
3/ le processus initiatique : la quête et la décapitation de Méduse exprimant la libération des énergies permettant l’éveil.
4/ la victoire sur le monstre des profondeurs marines : celui-ci exprimant les forces de l’inconscient ou Sur-moi tournées uniquement vers la satisfaction de la nature.
5/ la délivrance du principe âme : Andromède et..
6/ la fin de la personnalité égocentrique : mort du père de Danaé.
Cette épopée possède une coloration très volontaire et très directe ; elle ne parle pas des différentes phases de doutes et d’incertitude que déclenche le chemin de connaissance de soi. Mais, elle éclaire distinctement les phases élémentaires du chemin.


Vase Attique

Le mythe de Thésée
est déjà plus subtil, il commence avec le doute sur le père véritable de Thésée :
- naquit-il du roi Egée ou du dieu Poséidon, l’ébranleur de la terre ?
Unis dans la même nuit à Aïtra, ce sont ces deux pères qui donnèrent naissance à Persée.
- Son père naturel lui impose ensuite une épreuve : il place sous un rocher un coutelas et des sandales, lorsque Thésée aura assez de forces pour les prendre, il pourras rejoindre son père.
- Thésée sortit vainqueur de six (ou sept) épreuves sur le chemin qui le mène à son père. (malheureusement les textes que nous avons ne permettent pas d’en savoir plus)
- Thésée délivre Ariane et les jeunes gens captifs du Minotaure et ressort du labyrinthe.
-Le retour de Thésée et l’incident de la voile (noire ou blanche) entraîne le suicide du père de Thésée, qui lui succéda comme roi à Athènes.
Ce héros est né ainsi avec l’incertitude…
1/ de deux « natures » en lui, l’une faite de désirs humains et l’autre de nature divine.
2/ Les deux symboles qu’il prend sous le rocher possèdent encore cette double coloration : le couteau permet de trancher les liens et les sandales sont le signe d’une appartenance noble (1).
3/ Il lui faut passer sept épreuves : c’est à dire démontrer son détachement ou sa maîtrise des désirs de la nature septuple.
4/ Il doit renouveler l’âme, (Ariane) il lui faut la reconnaître en soi, la découvrir, et la délivrer du labyrinthe, c’est à dire des méandres inextricables engendrés par les sentiments et les pensées quotidiennes. Seule une attitude totalement orientée vers le divin en soi, permet la libération de l’âme, cette attitude est symbolisée par le fil que chaque mystes doit tenir fermement.
5/ Le résultat final dans ce mythe est celui de « devenir roi », c’est à dire maître de soi-même, en parfaite conscience de l’âme et de ces liens avec la nature et le divin. Nous pensons que ce mythe est malheureusement altéré ou tronqué de certains passages, qui permettraient une plus forte cohésion dans ce cheminement de conscience…


Vase Attique

Le mythe de Jason
est placé une octave plus haut, non pas? parce qu’il offre une meilleur description du chemin, mais parce qu’il ne s’adresse pas à un individu, mais à un groupe d’aspirants aux mystères.
C’est un message à l’humanité.
D’une autre manière, il permet de ne pas centrer ces aventures sur l’ego d’une personnalité. Ce mythe permet une approche « pluriels » de la connaissance de soi.
Il commence par
- Le désir de recouvrer sa royauté usurpée par son oncle.
- La reconnaissance de soi – le symbole de la sandale perdue –
- La nécessité de la quête de la toison pour laquelle tous les héros et demi-dieux de la Grèce viennent l’aider.
- Les îles ou les nombreuses épreuves sur le chemin de la terre du roi Aiétes qui possède la toison. Les compagnons de Jason lui sont essentiels dans cette phase.
- La rencontre avec Médée qui va l’aider pour rapporter la toison.
- Les épreuves imposées par le roi Aiétes que remporte Jason grâce à la magie de Médée.
- La prise de la toison, Médée endort le dragon.
- La fuite avec ses nombreuses péripéties, dont le meurtre du frère de Médée, par Jason.
- l’union de Jason et Médée, par le roi Alcinoos.
Et le retour...
Ce mythe est complet, car il possède les trois phases distinctes, reconnaissables, du cheminement spirituel de cette époque : la quête de la connaissance de soi, la reconnaissance de l’âme en soi, et l’union de l’être personnel avec l’âme sous la force de l’Esprit.
Le développement complet donne :
1/ la reconnaissance d’un manque : la dimension divine en soi – la royauté.
2/ l’opposition de la personnalité égocentrique qui ne veut s’occuper qu’a ses propres désirs naturels, (l’oncle Pélias).
3/ les forces dans l’être humain, (les héros), se mettent au service du processus de conscience de soi, qui est la première phase : la navigation vers la terre de Colchide –
4/ la Colchide et la rencontre avec le Sur-moi, (Aiétés) et le conflit inévitable.
5/ l’âme réveillée par l’amour pour Jason qui se met au service du processus et le conduit réellement.
6/ la prise de la toison, l’ouverture spirituelle à la dimension divine.
7/ la fuite – typique du conte-type 310 – car le sur-moi ne peut être vaincu, mais seulement apaisé, retourné, acceptant le retour au divin et la fin de sa prédominance, (le meurtre du frère)
8/ l’union entre la personnalité, l’intelligence attentive : Jason et l’âme : Médée, cela dans le royaume de l’Esprit, (le roi Alcinoos)
9/ le retour et la suite du processus intérieur jusqu'à l’intégration dans la dimension divine.
Ce mythe que vous pouvez retrouver en détails dans une autre page de ce blog, nous est parvenu grâce à un initié : Apollonios de Rhodes, qui a décidé de redonner l’intégralité de ce processus particulier, parce qu’il avait été avili antérieurement par certains auteurs.

Nous voici maintenant devant le mythe le plus célèbre depuis l’antiquité :
Le mythe du puissant Héraklès.
Ce mythe particulièrement attrayant est le chemin de l’initié, du myste, de l’homme capable de poser une attention parfaite au chemin de connaissance de soi. Aujourd’hui par comparaison ce serait l’enseignement intérieur d’un soufis, ou d’un moine bouddhiste ou taoiste, ou encore d’un véritable rose-croix. L’état de moine signifiant un état d’acceptation du but de la vie : redécouvrir sa propre dimension spirituelle ou divine.


Vase Attique

Ce récit décrit l’état d’Héraklès à sa naissance, qui est déja l’état de conscience d’initié. Mais examinons les phases de ce mythe complexe…
- Zeus se substitua pendant la nuit au mari d’Alcmène et ils conçoivent Héraklès.
- Alcmène accouche de deux fils : héraklès et Iphiklès, l’un fils de Zeus et l’autre de son mari Amphitryon.
- Héraklès étouffe dans son berceau, les deux serpents envoyés par Héra.
- Dans sa jeunesse il vit différentes aventures ; sa force terrible mais incontrôlée cause la mort du frère d’Orphée. Il tue le lion du Cithéron ; d’autres fait valeureux lui apportent la gloire, et de nombreuses conquêtes féminines.
- Il bataille contre les Thébains et les Minyens ; au cours de la dernière guerre, son père naturel meurt.
- Le roi Créon donne à Héraklès sa fille Mégara, qui lui donne trois fils.
- Héraklès reçoit des présent des dieux : une épée d’Hermès, un arc d’ Apollon, une cuirasse d’or d’Héphaïstos, et un manteau d’Athéna.
- La folie le prend et il tue ses propre fils et ceux de son frère Iphiklès.
- Pour purification de ses crimes, la Pythie de Delphes lui ordonne de se mettre au service du roi Eurysthée.
- Héraklés mène à bien les douze travaux que ce roi lui commande. 1/ Rapporter la peau du lion de Némée 2/ Tuer l’hydre de Lerne 3/ Capturer la biche Cérynite, aux ramures d’or 4/ Rapporter vivant le sanglier de l’Erymanthe 5/ Nettoyer les écuries d’Augias 6/ Chasser les oiseaux du lac Stymphale 7/ Ramener le taureau de Crète. 8/ Capturer les juments mangeuses de chair humaines 9/ Rapporter la ceinture de la reine des Amazones : Hippolytè. 10/ Ramener les vaches de Géryon. 11/ Rapporter les pommes d’or des Hespérides. 12/ Ramener Cerbère : le chien aux trois têtes, gardien de l’enfer.
- Après ses 12 travaux, Héraklès s’en va vers d’autre aventures. Dans un nouvel acte de folie il tue Iphitos ; il combat le dieu Apollon à Delphes où il était venu demander un oracle.
- A cause de cet acte, il se met au service de la reine Omphale, pendant trois ans. (D’après certains textes, il aurait participé au siége de Troie, mais à mon sens il s’agit d’un ajout tardif, comme nombres d’autres aventures. Ce qui ne facilite pas la compréhension de cette Geste.)
- Héraklès épouse la fille d’Oineus : Déjanire, il la conquiert en luttant contre l’Achéloos.
- Le centaure passeur Nessos veut violer Déjanire sur le fleuve dont il a la garde, mais Héraklès le tue d’une flèche. Avant de mourir, le centaure ment à Déjanire en lui donnant la recette d’un filtre d’Amour fabriqué avec son sang, en réalité un poison pour Héraklès.
- Après une autre victoire Héraklès, souhaite offrir un sacrifice à Zeus, et demande à sa captive : Iole, un vêtement éclatant digne du souverain des dieux.
- Déjanire, par jalousie envers la belle Iole, enduit la tunique du « philtre d’amour » inventé par le fourbe centaure. La tunique enduite de poison brûle profondément Héraklés. Mourant, il monte sur un bûcher placé sur le faîte d’une montagne.
- Une nuée descend des cieux et emmène Héraklès dans le monde divin auprès des dieux qui lui accordent l’immortalité.


Vase Attique

Rappelons que ce mythe, est un guide pour un initié qui s’est totalement engagé sur le chemin spirituel.
1/ Cet initié sait intérieurement qu’il possède une dimension divine, - qu’il est fils de Zeus –
2/ Qu’il est donc porteur de deux natures : (le nirvana et le samsara selon l’Orient), celle de la personnalité orientée vers les désirs et les lois de ce monde : son demi-frère jumeau : Iphiklès – et la nature puissante du divin, encore à découvrir : Héraklès –
3/ Cet initié le prouve en étouffant les deux serpents, dés avant le premier pas qu’il pose sur le chemin. Ceci marque le sceau du commencement.
4/ le chemin de la connaissance de ses capacités et de ses faiblesses est juste esquissé, (mais là encore, nous ne disposons plus des deux textes originaux : les Héraklèides du septième siècle). Ceci marque la première phase : la connaissance de sa nature humaine, une connaissance psychologique de ses affects.
5/ Son père naturel meurt : le principe de l’ego est reconnu en soi dans toutes ses manifestations.
6/ La confrontation avec la première manifestation de l’âme, (Mégara) est effective et donne du fruit (trois fils) : la compréhension intérieure intuitive des trois principes universels. Le principe de l’éveil de l’âme est juste esquissé et cette dimension se retrouve comme en filigrane derrière le mythe, - le principe de ce mythe est de décrire les étapes de la conscience volontaire du myste. En cela les deux mythes de Jason et d’Héraklès se complètent et se trouvent d’ailleurs mêlés dans l’histoire de La Toison d’Or.
7/ les dons divins ou forces de l’Esprit affluent dans l’être.
8/ l’initié est encore trop faible ou – c’est le cœur du mythe d’Héraklès – son orgueil et sa connaissance du dogme et du chemin est forte, mais il ne possède pas encore de réel équilibre. Il ne sait pas garder les forces de l’Esprit et sa volonté d’aller le chemin est violente et se porte contre soi et contre les autres.
9/ Voici la phase nécessaire de la purification dictée par sa propre voie intérieure et par l’école initiatique.
10/ Il faut franchir les étapes qui conduisent à la parfaite connaissance de soi, la parfaite intégration des principes divins, des lois profondes et subtiles, et de la filiation des actes engendrés par le karma et des actes causés par la relation à la culture et à la famille. Cette connaissance se fera en douze phases:
1T/ Héraklès bouche une entrée de la caverne où s’est réfugié le lion de Némée et assomme la bête avec sa massue, - l’initié se coupe consciemment des forces et désirs de la nature – il condamne une entrée : celle du Samsara et étouffe ses désirs terrestres.
2T/ L’hydre de Lerne est blottie dans un marais, elle a de nombreuses têtes qui repoussent constamment – L’hydre représente les pensées surgissant continuellement et prenant leurs sources dans les tréfonds de l’inconscient.
3T/ La biche Cérynite, aux ramures d’or, représente la part divine, vivante et subtile à laquelle il faut accorder beaucoup d’attention et de patience.
4T/ « Rapporter vivant le sanglier de l’Erymanthe. » Cette épreuve place Héraklès en face d’un précepteur célèbre : le centaure Chiron, qu’il blesse malencontreusement, et qui meurt malgré son immortalité accordé par la grâce de Prométhée. La force de l’esprit en l’initié doit se manifester et cela rend inutile les enseignements précédents.
5T/ « Nettoyer les écuries d’Augias. » : L’initié ne peut par ses seules forces comprendre et évacuer les actes commis dans sa vie propre et les vies antérieures. Cela ne peut ce faire que par les forces nouvelles de l’Esprit et de l’âme, - les deux fleuves traversant les écuries.
6T/ Héraklès chasse les oiseaux du lac Stymphale avec le bruit de deux claquettes en bronze. Le lac représente l’espace de paix de l’âme qui commence à s’établir en l’initié, mais il lui faut être attentif aux désirs qui peuvent troubler cette dimension. C’est toujours en reconnaissant la fonction duelle - les deux claquettes - de ses désirs rattachés au Samsara, que l’on peut les faire disparaître.
7T/ « Ramener le taureau de Crète » : c’est le taureau qui a amené Europe sur son dos en lui faisant traverser la mer. Pour un initié grec, il s’agit de se relier complètement à la dimension sacrée originelle. La source première spirituelle de la culture occidentale.
8T/ « Capturer les juments mangeuses de chair humaines » : Les pulsions de l’être naturel doivent être domptées définitivement.
9T/ « Rapporter la ceinture de la reine des Amazones, Hippolytè » : se ceindre est une vieille expression signifiant s’entourer, se préserver et ici c’est le symbole des forces de l’âme vigilante qui gardent maintenant l’initié.
10T/ « Ramener les vaches de Géryon » : Les vaches représentent un très vieux symbole Indo-Européen, ce qui nous permet de dater ce mythe d’au moins deux mille ans avant notre ère, époque où le sens de ce symbole était encore vivant. En sanscrit, le terme « Go » signifie : vache, mais également : lumière. Ainsi ce sont les éclats de lumière de l’Esprit qui entrent dans le corps de l’initié. Le texte précise d’ailleurs que c’est grâce à la coupe du dieu Hélios : le soleil, qu’Héraklès peut faire traverser la mer à ces vaches. La lumière de l’Esprit inonde la conscience du myste.
11T/ « Rapporter les pommes d’or des Hespérides » :
Que représentent les pommes d’or ? Le texte d’Apollodore dit que ces pommes avait été offertes par Gaia, à Zeus et Héra lors de leur mariage. Gaia ne représente pas seulement la terre, mais signifie la matière originelle divine. Elle participe de la triade créatrice originelle : Kaos, la volonté actante première, Gaia, à la fois matrice à la base de toutes choses et matière originelle, support énergétique de l’univers, et Eros le principe de la manifestation, d’ou viennent toutes actions. Zeus et Héra sont les dieux qui président les lois naturelles du monde.
Cette épreuve ne peut être réalisée par les seules forces de l’initié. Celui-ci doit s’attaquer à l’oubli originel qui enferme son être dans une vision dualiste illusoire. Le texte dit qu’il demande à Nérée : le dieu sans oubli, de lui révéler l’endroit où sont gardés les pommes d’or. Elles naissent au pays des Hyperboréens, c’est à dire au delà de la terre, ou du Samsara. C’est donc la première conscience active du monde divin en soi, le premier éveil, car l’initié arrive au coté du dieu Atlas (le support du plan divin) qui seul pourra lui rapporter les pommes. Ainsi l’initié reprend véritablement conscience de sa réalité divine, et par les forces de l’Esprit en lui et non plus grâce à ses anciennes possibilités, il acquiert à nouveau les fruits de l’Esprit originel.
12T/ Ramener Cerbère : le chien aux trois têtes, gardien de l’enfer. Pluton mit en demeure Héraklès de maîtriser l’effroyable chien, sans aucune arme. L’initié démontre maintenant qu’il n’a plus besoin des anciennes forces de la personnalité, créés par le monde duel et cette épreuve est le sceau de la maîtrise de Soi relié à l’originel.


Représentation de divers exploits de Thésée

voici le défilement des étapes de l’initiation dans l’ancienne Grèce.
1/ Cet initié sait intérieurement qu’il possède une dimension divine.
2/ Qu’il est donc porteur de deux natures : celle de la personnalité orientée vers les désirs et les lois de ce monde et la nature puissante du divin.
3/ Cet initié le prouve en étouffant les deux serpents, dés avant le premier pas qu’il pose sur le chemin. Ceci marque le sceau du commencement.
4/ le chemin de la connaissance de ses capacités et de ses faiblesses est juste esquissé, (mais là encore, nous ne disposons plus des deux textes originaux : les Héraklèides du septième siècle). Ceci marque la première phase : la connaissance de sa nature humaine, une connaissance psychologique de ses affects.
5/ Son père naturel meurt : le principe de l’ego est reconnu en soi dans toutes ses manifestations et ainsi ce principe devient comme inerte, sans force, car reconnu par la conscience.
6/ La confrontation avec la première manifestation de l’âme, (Mégara) est effective et donne du fruit (trois fils) : la compréhension intérieure intuitive des trois principes universels. Le principe de l’éveil de l’âme est juste esquissé et cette dimension se retrouve comme en filigrane derrière le mythe, - le principe de ce mythe est de décrire les étapes de la conscience volontaire du myste. En cela les deux mythes de Jason et d’Héraklès se complètent et se trouvent d’ailleurs mêlés dans l’histoire de La Toison d’Or.
7/ les dons divins ou forces de l’Esprit affluent dans l’être.
8/ l’initié est encore trop faible ou – c’est le cœur du mythe d’Héraklès – son orgueil et sa connaissance du dogme et du chemin est forte, mais il ne possède pas encore de réel équilibre. Il ne sait pas garder les forces de l’Esprit et sa volonté d’aller le chemin est violente et se porte contre soi et contre les autres.
9/ Voici la phase nécessaire de la purification dictée par sa propre voie intérieure et par l’école initiatique.
10/ Il faut franchir les étapes qui conduisent à la parfaite connaissance de soi, la parfaite intégration des principes divins, des lois profondes et subtiles, et de la filiation des actes engendrés par le karma et des actes causés par la relation à la culture et à la famille. Cette connaissance se fera en douze phases :
11/ Tout initié sait que tant que l’on réside sur cette terre d’oubli, la faute, ou chute est toujours possible. C’est ce que démontre l’épisode du meurtre d’Iphitos, aussi la nécessité d’une retraite ou purification de trois ans est citée dans ce mythe. Cet épisode pourrait plaire aux bouddhistes et les conforter dans leurs pratiques…. il est toujours difficile de participer aux aléas de ce monde changeant et incertain. Un retrait du monde même léger est requit…
12/ Héraklès épouse Déjanire : voici l’union totale de l’âme / l’intuition médiatrice et de l’initié réveillé / l’intelligence active présente dans l’instant.
13/ l’âme doit brûler tout ce qui reste de l’ancienne stature, de l’ancienne personnalité de l’initié. C’est à ce seul prix que la fusion dans l’éternel divin est possible.
Ce message mythique retrace complètement les phases de l’éveil à l’époque de l’antique Grèce. C’était et c’est encore, un formidable outil qui permet de percevoir la brillante école des mystères qui se cache derrière ces héros.


Ainsi chacune de ces légendes parle d’un aspect différent de la psyché humaine et amène l’initié aux mystères à se comprendre intuitivement à travers ce qui est devenu un conte.
Le sens de ces histoires lorsqu’elles furent répandues dans le monde permettaient aux hommes et aux femmes, une compréhension intuitive du sens de l’existence terrestre et de la direction que devait prendre tout être : la voix du véritable chemin du cœur, le véritable chemin spirituel.


L'Aède