Les trois consciences dans l'homme

Dans la plupart des études sur les légendes que vous avez pu lire sur ce site, il est fait référence à l'initiation, et aux nombreuses descriptions de cette initiation qui fait passer l'adepte par différentes phases. Ce sont ces phases que j'ai essayé de décrire à travers des légendes, et spécifiquement à l'aide des contes-types. Ces légendes ancestrales avaient été structurées en fonction des phases de l'initiation spirituelle. L'initiation spirituelle se révèle par une prise de conscience graduelle, comme la reconnaissance en soi des différentes formes de conscience qui animent la personnalité. Le but de l'initiation n'étant pas à proprement dit l'Eveil, comme certains le pensent, à partir d'un processus évolutif. L'initiation arrive à son but quand l'être humain reconnaît en lui toutes les formes de conscience qui l'habitent. Une fois que l'être humain a pleinement fait cet "état des lieux", il peut accéder au silence qui ouvre la porte à son être réel : la plénitude divine, l'éveil.
C'est la chose la plus simple : si vous nettoyez la fenêtre de votre maison des pollutions qui l'obscurcissaient, alors la lumière peut pénétrer, sans que votre volonté y soit pour quelque chose.

A la suite de ces multiples descriptions des formes de l'initiation, il nous a semblé nécessaire de décrire le scénario naturel, celui du processus de la vie. Le processus de conscience que l'être humain connaît au fur et à mesure de son existence. Je vais donc essayer de décrire l'évolution de l'être personnel, tel que je l'ai compris. Vous n'êtes pas obligés de croire tout ce qui va suivre, mais si ces considérations ouvrent quelques interrogations en vous, ce sera déjà bien.
Voici donc le récit du développement de conscience spirituel, naturel et ésotérique de l'homme.

L'enfant qui naît dans ce monde, ne naît pas du néant. Bien sûr, il provient d'une matrice et d'un faisceau d'éléments, sociaux, culturels, physiologiques qui vont de pair. Mais, ici, nous parlons d'être spirituel, pourvu de certaines formes de conscience. Nous ne parlerons pas de psychologie, de sociologie, ni d'autres aspects superficiels.
Pour les ésotéristes et les spirituels, l'être divin est là, Essentiel, et c'est cette "entité" qui décide de "prendre" un corps humain, quand un fœtus arrive à maturité. Pourquoi tel ou tel fœtus ? Là n'est pas notre sujet... L'entité divine, seule réalité hors du temps et du monde, peut être figurée comme une étincelle de lumière avec sa sphère lumineuse, magnétique, autour d'elle. Cette étincelle est située dans le cœur humain et porte la manifestation de la personnalité en devenir.
L'enfant naît et aussitôt, l'intelligence l'accompagne... concevons cette intelligence du corps humain comme une sphère de conscience proche de l'étincelle d'éternité, au niveau du cœur. L'intelligence est dans l'instant, elle perçoit, vit, découvre, apprend, mais ne tire pas de conclusions, elle reste dans l'expérience.

Il y a une autre forme de conscience qui se forme également à la naissance, juste après, c'est celle de l'instinct, au niveau du ventre. Ces deux formes de conscience se côtoient et s'harmonisent, pendant les premières années de l'enfant, expérimentant l'une et l'autre dans le moment vivant.
Une troisième forme de conscience surgit bientôt; celle-ci a son siège dans la tête et son but se révèle rapidement : sauvegarder la forme de personnalité face aux dangers de l'existence et face aux multiples péripéties que peut expérimenter l'enfant.
Cette conscience devient de plus en plus attentive quand se forme dans l'enfant la perception du temps. Cette perception du temps va impacter profondément le cerveau, l'outil préféré de cette conscience, qui va classifier toutes les expériences de la personnalité, les confronter à sa connaissance du monde et de ses lois, et projeter les scénarii possibles dans l'instant suivant, dans le but de préserver l'enfant. Cette forme de conscience que nous allons appeler le mental, va se servir de la masse cérébrale, pour atteindre son but la "conservation de soi".

Nous avons ainsi trois formes de consciences dans l'être humain, deux vivant dans l'instant et une résolument posée sur la notion d'espace-temps. Voila la situation de chaque enfant, mais si ces trois consciences vivent en harmonie dans les premier temps, cette syntonisation se dégrade au fil du temps, car le mental prend vite la direction de la personnalité, pour mieux préserver l'être, face aux nombreux dangers de notre société et pour lui permettre une bonne évolution sociale. Puisque nous parlons d'évolution dans le temps et l'espace, évoquons aussi la notion - non d'involution - mais d'entropie. Cette loi, n'est que rarement évoquée, mais elle est bien réelle, comme le vieillissement, la décrépitude. Ce qui est valable pour le corps, est aussi valable pour la conscience.
Ainsi quelques années se passent pour l'enfant lorsque surgit ce que l'on appelle l'ego. On compare l'ego à une conscience enfantine, mais qui pour certains, ne s'arrête pas avec la fin de l'enfance, et perturbe considérablement l'entourage. L'ego a même pour certains complètement remplacé l'instinct; c'est une "malfaçon" évidente, une déviance de l'instinct.
Cette forme altérée de conscience est une incidence de l'instinct due à une pression, (nous verrons plus loin quelle peut être l'origine de cette pression). L'instinct a pour programme : "sentir" ce qui est bien ou bon, pour le corps et l'être, percevoir les effluves du moment, et ainsi choisir le bon sentier, la bonne manière d'être. Mais l'ego, lui, réagit seulement à deux critères : j'aime - je n'aime pas ou je veux - je ne veux pas.
Toute conscience est une forme d'énergie, vivant de multiples sources au début. La forme "instinct" s'est dédoublée au mieux (une part d'elle restant latente, sous-jacente) ou a été totalement phagocytée par l'ego. Cette nouvelle forme de conscience, l'ego dominant, s'est nourrie de sa propre énergie, et ainsi n'étant plus reliée à la puissance unique de l'instant, s'est trouvé coupée de l'énergie vitale. Comme la forme d'action de l'ego est duelle, son énergie est double à la façon d'une pile électrique, avec un pole positif et un pole négatif. Cela ne donne que deux choix et restreint considérablement la vision de l'être et de la vie de la personnalité.

C'est la première rencontre : l'ego, la première étape que vit l'adepte dans l'initiation, parce que c'est la plus évidente. Quand l'adepte au bout d'un certain temps, a perçu le jeu de l'ego, sa conscience s'éclaire. D'abord l'emprise de l'ego devient nulle, ainsi l'adepte est libre, bien que l'ego soit toujours présent, libre parce qu'il le voit venir avec ses manœuvres peu subtiles. Donc quand l'adepte a parfaitement reconnu le jeu de l'ego, les manœuvres habituelles de l'ego, il découvre ensuite les multiples phénomènes développés par ses consciences: c'est à dire la relation entre ses propres conflits et les lois du monde, les lois sociales et les lois physico-subtiles des mondes d'énergies qui l'entourent. La leçon que lui a appris la confrontation a l'ego, c'est de rester à l'écoute de ses pensées, des ses sentiments, de ses mouvements intérieurs et de vérifier s'ils sont bien en accord avec son être intime. Cette attitude permet à l'adepte de percevoir ce qui est de lui et ce qui peut venir d'influences extérieures à lui...
Mais reprenons le parcours de celui qui n'est déjà plus un enfant. Cet être a vécu les phases de l'adolescence, s'est confronté à son propre ego, mais également à ses propres désirs et à ses propres volontés de destinées. L'être a ainsi perçu les multiples phénomènes de la psyché et les mouvements erratiques de la psychologie humaine. S'il a pu maîtriser son ego, l'a domestiqué, il peut maintenant accepter une vie parfois difficile ou incompréhensible, mais relativement stable ou alors, il s'interroge...

S'il s'interroge, c'est grâce à son intelligence, celle qui est toujours active dans l'instant. L'instinct a pris "un coup de vieux" dans cette société très matérialiste, et en outre, s'est fait phagocyter par l'ego. A partir de là, normalement, vous pourriez vous interroger : que devient le mental ???
Nous y venons justement... pour nous, le mental : c'est la conscience qui s'occupe de la sauvegarde de la personnalité, celle qui a pour mot d'ordre "conservation de soi" et comme outil formidable un réseau de neurones gros comme un ballon - un petit ballon quand même!
Mais voyez vous, quand votre esprit est tourné vers ce qui peut arriver dans l'avenir, quand le mental est totalement occupé a préserver la personnalité de tout danger, il est soumis également à l'angoisse, au doute, et finalement au soucis de tout dominer. Un homme soumis à une continuelle pression comme celle-ci finit par "disjoncter" et en arrive à une attitude autoritaire afin de maîtriser l'espace et le temps. Alors, la dimension de liberté de l'être devient plus étroite, la vision du monde se rétrécit également. Le mental uniquement orienté vers "son" évolution, en fonction de ce qu'il croit être le seul but de la personnalité, ne perçoit plus que ce qui rentre dans son cadre. C'est cette "pression" qui a fait naître l'ego et évacuer l'instinct. Le mental s'est changé en dictateur, et le mental est puissant, puisque qu'il a comme outil extraordinaire un réseau de neurones efficace.

Là, vous vous dites que c'est absurde.... car le mental vous permet de construire des édifices, de concevoir, de réaliser des choses extraordinaires ou de régenter votre vie quotidienne. Le cerveau, oui, le cerveau permet de concevoir de multiples formes de combinaisons et ainsi vous permettre de vivre pleinement votre existence. Mais le cerveau décide t-il pour vous ?
Vous ne confondez pas vos émotions avec votre muscle cardiaque, non plus que vos pulsions instinctives avec les organes de votre ventre, alors ne confondez pas la conscience qui vous dicte certaines directives en fonction de différents scénarios, avec votre cerveau qui est un simple ordinateur. Le cerveau, ce réseau de neurones formidable, stocke toutes vos expériences et en fonction de vos réactions, détermine le meilleur chemin de réalisation pour la personnalité. Votre cerveau est une extraordinaire machine, mais est-ce qu'il vous programme...?
Est-ce que c'est vous qui déterminez, avec les éléments sortis de cet ordinateur votre propre chemin, ou êtes vous influencé...?
Est-ce que votre pensée se pose rationnellement sur vos choix et choisit en toute conscience ? C'est là, la question...

Si vous ne vous êtes jamais posé la question d'où proviennent certains de vos choix, arrêtez cette lecture, car elle ne vous concerne pas. Si au contraire vous vous êtes posé la question des directions que vous avez prises dans votre existence sans que les influences sociales, familiales, n'y aient été pour rien, cela a peut-être provoqué un doute...
Alors qu'en est t-il ?
Cette posture devant l'interrogation, est la deuxième phase de l'initiation. L'adepte, doit être à l'écoute des pensées à présent, distinguer celles qui sont "mécaniques" provenant du cerveau de celles qui sont "influences" qui sont du fait du mental. Le cerveau est toujours occupé à extraire des éléments du passé pour projeter des scénarii dans l'avenir ou à concevoir des structures. Ce sont des formes de pensées très structurées.
Le mental apportera des directives, ce que ne fait pas le cerveau. Il vous influence en fonction de la sauvegarde du corps, ce qui fait que vos expériences sont moins riches et que le jugement des autres, des événements devient prépondérant en vous. Ainsi il réduit le champ de votre espace de vie.
Pourquoi cela ?

- A l'origine la conscience de la tête était également centrée sur l'instant, comme l'intelligence et l'instinct. Ces trois consciences étaient une pour percevoir la richesse des expériences de ce monde. L'intelligence était au plus près de l'étincelle originelle, et elle est restée ancrée dans le moment présent. C'est elle qui vous donne votre stabilité, qui permet de distinguer ce qui est juste, pour vous comme pour le monde.
- L'instinct, lui, permet de percevoir le monde dans sa diversité de mouvements, d'énergies, de placer l'être en syntonisation avec tous les êtres, matériels ou subtils, de les ressentir.
- Le mental devait être au service de l'expérience du corps, percevoir et enregistrer tout ces éléments. acter simplement le mouvement de la vie dans la matière, sans jugement, sans acte volontaire. Il devait garder la personnalité en dehors des dangers, non pour un développement dans le temps, mais simplement pour rester dans l'expérimentation.
Mais la force d'énergie de l'espace-temps, crée une pulsion d'évolution, et donc de directions. Et le mental a succombé à cette force. Au lieu d'être au service de l'expérience, de l'expérimentation, il s'est tourné vers un but pour la personnalité, croyant au départ que c'était pour le bien de l'être humain. Malheureusement, la force d'entropie de notre monde de l'espace-temps a perverti encore plus le mental. Puisqu'il donnait les directives à la personnalité, il était donc devenu selon lui, son maître et finalement corrompu par le goût du pouvoir, le mental est devenu totalement dominateur. D'autant plus qu'il possède les clés du cerveau/ordinateur. Cette conscience est orgueil, volonté arbitraire, despotique.
Dans les légendes elle est nommée le "diable", le "rusé", le "maître du château" qui tient enfermé la belle princesse. Le mental se croit le maître puisqu'il dispose d'un cerveau qui peut prévoir l'avenir, en fonction des éléments du passé. Mais cela ne marche pas toujours à la perfection, le doute est toujours la, ainsi que la peur. Bien sûr, la peur lui est familière, puisqu'elle s'est centrée sur le temps et l'espace. L'avenir est incertain par nature...

Cette forme de conscience s'est coupée de l'instant vivant en se posant sur la dualité de l'espace-temps. Mais en cela elle s'est coupée de l'énergie spirituelle ou divine... Ainsi, en plus du doute et de la peur, le mental n'a de forces que s'il est dans un mouvement d'opposition permanent. Nous retrouvons ici les deux polarisations d'une pile électrique. Le mental est dans la même position que l'ego, avec un large cran de puissance au-dessus, et doit être continuellement dans une forme d'action et réaction pour se croire vivant.
D'où croyez vous que provienne le Conflit en vous ?
Cette conscience du mental est duelle, toujours occupée à se sauvegarder et à faire en sorte que le silence de l'instant ne vienne dévoiler ses influences. Le diable inventé par la religion, le "diabolus", c'est l'être duel.
Pourquoi croyez vous que toutes les spiritualités demandent de vivre dans le présent, à l'aide de formes diverses de méditations ?
Parce que, quand l'on est dans le présent, le mental prisonnier du monde de l'espace-temps n'a plus d'emprise sur notre conscience... n'a plus d'emprise sur la personnalité.

Si certains l'ont appelé le diable, cette troisième conscience est nommée par les rose-croix : être Aural. Mais qu'importe le nom, si l'on a pu la regarder dans les yeux... et être libre dans l'instant vivant.
Que faire alors ? Entrer en conflit avec le mental ?
Mais le conflit est l'essence même de sa puissance...
C'est votre intelligence, celle du cœur, dans l'instant qui est le seul remède. L'écoute est le remède, l'attention à ce qui est, ce qui se passe en vous sans jugement, les relations psychiques se démontrent d'elles même. Avoir confiance en votre intelligence et rester le plus stable possible finit par redonner une certaine paix au mental. il ne disparaîtra pas, ses habitudes de domination ont été trop actives, trop ancrées dans l'être, mais si l'intelligence est alerte, attentive inlassablement... alors la personnalité peut s'épanouir à l'expérience de la vie.
Voila, c'est simple... c'est le message de Krishnamurti, de Nisargadatta Maharaj et de tous les spirituels de la terre. Mais alors pourquoi est-ce si difficile de passer dans l'éveil...?
Le mental qui est décrit dans les légendes comme un diable, est-il si puissant ? Est-ce effectivement l'incarnation du mal ?
Il est dominateur, c'est un fait, mais le "mal" est un concept religieux, édifié pour maintenir la peur, pour maîtriser un peuple, c'est un outil créé par d'autres dominateurs. Le diable est duel, parce que l'être humain perçoit deux voies en lui, celle de l'intelligence du cœur et celle du mental, et ces influences sont les plus fortes. Le mental est puissant, mais son optique paranoïaque consiste simplement à rester celui qui dirige la personnalité, "pour son plus grand bien".
Pourquoi dans ce cas, est-ce si difficile de passer dans la dimension de l'instant, à l'éveil...?
Nous avons vu que si le mental était influencé par l'espace-temps, c'est peut-être que la force de cette dimension a un effet emprisonnant sur l'être humain, surtout s'il ne fait pas attention, s'il est ignorant de ses influences. L'instinct sait que la terre sur laquelle la personnalité met les pieds a une influence sur l'être, qu'elle a une aura en tant que telle, spécifique à chaque territoire. En fait, tout est vibration, énergie, et ce "monde d'énergies" a forcement une attraction sur le corps d'énergie de l'être humain. Plus la vibration est créatrice, plus son emprise est forte. La dimension du temps crée le concept d'évolution, la matière crée le concept d'attachement et l'être humain vit dans ces deux mondes.

Il ne suffit pas simplement de regarder le mental en face pour reconnaître sa maladie, ses manœuvres, il faut également reconnaître le milieu ou l'être se meut. L'influence de la matière et du temps ont créé de multiples concepts en l'être. Si le maître mot des bouddhistes est l'ignorance de l'homme, nous pourrions dire que l'occidental est soumis, lui, à l'illusion du temps et de la matière. Reconnaître la puissance de ces concepts actifs en l'être place l'homme dans le seul instant, la seule réalité...

Il faut donc percevoir le mental et ce qui fait dévier le mental.
Alors il ne reste que le petit carré ou se tient l'homme divin aux trois consciences dans le vaste cercle de l'univers.

L'Aède